Le témoignage de Lili Keller-Rosenberg

Le témoignage de Lili Keller-Rosenberg

Mardi 11 octobre, 600 collégiens et lycéens ont été réunis au Centre départemental de la communication à Périgueux pour écouter le témoignage de Lili Keller-Rosenberg, épouse Leignel, 90 ans, déportée à l’âge de 11 ans avec toute sa famille. 

Debout sur la scène du centre de la communication de Périgueux, mardi 11 octobre, face à 600 collégiens et lycéens, Lili a déroulé son implacable témoignage. À 90 ans, elle raconte son arrestation en 1943 près de Lille avec ses parents et ses deux frères, son passage dans des camps de transit en Belgique, le voyage de quatre jours sans boire ni manger serrés dans un wagon à bestiaux, l’arrivée au camp de Ravensbrück. Privations, mauvais traitements, maladies, elle explique comment, à 11 ans, elle a pu tenir grâce à la ténacité de sa mère. Son père avait été envoyé vers le camp de Buchenwald.

Dans la salle, on n’entend pas un bruit, tous les jeunes sont suspendus au récit de cette vieille dame pimpante ne cachant rien des horreurs vécues il y a près de quatre-vingts ans. On y trouve de précieux conseils de survie : « Dans le camp il fallait rester digne et faire sa toilette, c’était déjà un acte de résistance… Quand on se laisse aller, la mort arrive très vite. » Elle raconte ceux qui se pinçaient les joues pour se donner un peu de couleur avant les appels : les malades étaient souvent éliminés. Odeur pestilentielle L’horreur monta d’un cran lorsqu’elle fut transférée au camp de Bergen-Belsen. « On y a découvert un spectacle de fin du monde, avec des cadavres à enjamber, des déportés qui les ramassaient dans une charrette avant d’aller les brûler dans des fosses à ciel ouvert.

L’odeur était pestilentielle.

Lili raconte qu’elle « crevait de faim » et se disait parfois qu’il « aurait mieux valu mourir que de vivre comme des bêtes ». Questionnée par la salle, elle a avoué avoir fait des cauchemars durant des années. La libération du camp le 15 avril 1945, par des soldats anglais, marqua le début d’une nouvelle aventure. Les trois enfants, évacués sans leur mère, arrivèrent seuls à Paris. Ils purent rejoindre une tante dans les Deux-Sèvres, toujours dans l’angoisse de ne pas retrouver leurs parents. Finalement, leur mère finit par revenir vivante, pesant 27 kilos. Mais leur père fut déclaré mort à Buchenwald. « Après la guerre, des gens mettaient en doute ce que nous racontions. En entendant ces négationnistes, j’ai décidé de témoigner et surtout auprès des jeunes. Je le fais au nom de ceux qui ne sont pas revenus, pour combattre le racisme, l’antisémitisme et toutes les haines. Nous devons nous supporter avec toutes nos différences. »

« Jusqu’à 100 ans »

Lili Keller-Rosenberg continue donc inlassablement à parcourir la France, à raconter et même à chanter des chansons apprises dans les camps. « Quand il n’y aura plus de déportés vivants, vous serez nos messagers pour poursuivre le devoir de mémoire. Moi je vais continuer au moins jusqu’à 100 ans… Après on verra », glisse-t-elle avec malice. Les élèves sont debout pour l’applaudir avec ferveur et émotion.

Ils sont venus du collège Montaigne dont la professeure d’histoire Aurélie Ducassou a organisé cette rencontre, en invitant d’autres établissements : Bertran-de-Born, Jay-de-Beaufort, Laure-Gatet, Clos-Chassaing, Picasso et même le collège de Saint-Astier. Ces jeunes se souviendront de cette rencontre.

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