L’ouvrage référence de Bernard Reviriego

L’ouvrage référence de Bernard Reviriego

Bernard Reviriego, ancien conservateur en chef du patrimoine aux archives départementales, membre de notre Groupe de travail historique, est l’auteur d’un nouvel ouvrage qui fera référence et qui nous est déjà, dès sa parution, fort utile : « Fusillés et morts au combat en Dordogne (1940 – 1944). 

Publié aux éditions « Secrets de Pays », et nous saluons Jacky Tronel pour cet engagement, il est disponible dans toutes les bonnes librairies de Dordogne. Photo ci-dessus prise par Jacky Tronel.

Voici l’Article de Clément Bouynet publié dans l’édition de la Dordogne de Sud-Ouest le mardi 30 octobre :

« « Exhaustif : qui traite complètement, épuise un sujet. » Voici comment résumer, en un mot, les années de travail de Bernard Reviriego. Cet ancien documentaliste et archiviste s’est lancé dans une entreprise d’ampleur : recenser toutes les victimes non déportées mortes en Dordogne durant la Seconde Guerre mondiale. Le résultat, intitulé « Fusillés et morts au combat en Dordogne (1940-1944) » (1), est amené à devenir un livre référence pour qui s’intéresse à cette période de l’histoire. 

Comme dans l’un de ses précédents ouvrages – « Les Juifs en Dordogne (1939-1944) », paru en 2023 – cet ancien conservateur en chef du patrimoine dresse pour chacun un historique et une notice. « La Dordogne est le deuxième département de France en termes de pertes civiles. Je me suis servi de deux sources : les témoignages et les états civils », explique Bernard Reviriego. Avec les complexités que cela entraîne, 80 ans plus tard : textes lacunaires, noms d’emprunt des Résistants, témoins directs disparus, etc. L’auteur précise : « Il faut trouver le chaînon manquant, la pierre de Rosette qui permet de tout connecter. » Bernard Reviriego se pose en Champollion de la mémoire du Périgord. »

« Une course effrénée dans un cimetière, à la recherche de la tombe d’un inconnu. Les amateurs de westerns spaghetti fredonnent la musique d’Ennio Morricone, accompagnant les foulées désarticulées d’Eli Wallach, légendaire Tuco dans « Le Bon, la brute et le truand. » Bien loin du soleil harassant de Sad Hill, Francis Stévenin s’est rendu dans le cimetière de Cantillac, à Brantôme-en-Périgord, afin de localiser, lui aussi, une sépulture sans nom : celle de son oncle.

« Arrivé dans le cimetière, j’ai cherché, cherché… Je commençais à avoir des doutes, puis je suis rentré dans l’église. J’ai alors vu une plaque commémorative avec plusieurs noms et la mention d’un inconnu. J’étais au bon endroit », souffle le Normand. Cette certitude, il l’a acquise grâce à la besogne bénédictine de Bernard Reviriego, historien périgordin. Dans son ouvrage « Fusillés et morts au combat en Dordogne », il liste près de 1 200 personnes disparues dans le département lors de la Seconde Guerre mondiale.

Chevalière

« J’ai pu identifier sept ou huit inconnus, glisse modestement Bernard Reviriego. Pour celui de Cantillac, je me suis basé sur le descriptif du corps dressé par l’acte d’état civil du 29 mars 1944. On parlait d’un blond de 21 ans mesurant 1,72 m, le teint pâle, un pantalon de velours, un béret basque, une chemise mauve et un caleçon en coton gris. Surtout, il portait une chevalière avec les inscriptions S. R. » Recoupant ces informations, il met un nom sur un jeune résistant originaire des Ardennes : Roger Stévenin. En 2022, son neveu Francis reçoit un coup de fil de Bernard Reviriego. « J’ai pensé à mon père et à mon autre oncle. Ne pas savoir ce qu’il était advenu de Roger, c’était le drame de leur vie. » Des sanglots dans la voix, Francis Stévenin évoque l’impossible deuil et le poids de la disparition. « Cette histoire, c’était le tabou de la famille. Dès que mon père évoquait son frère, il pleurait. » Soixante-dix-huit ans après la mort de son oncle, Francis Stévenin a enfourché sa bicyclette et avalé 500 kilomètres afin d’assister à une commémoration à Cantillac. Un périple cathartique : « C’était pour éprouver la souffrance que mon oncle avait pu ressentir. » Anomalies « Pouvoir commémorer le décès de ces personnes qui n’ont pas eu de sépulture, ce n’est pas neutre », abonde Jean-Jacques Ruttner. Ce dernier a appris en 2019 que son grandpère reposait dans le paisible cimetière de Sainte-Marie-deChignac, dans la commune de Boulazac-Isle-Manoire. L’aboutissement de dizaines d’années de recherches lancées par sa grand-mère et son père, avant qu’il ne reprenne le flambeau à leur décès.

L’homme butte un jour sur un arrêté ministériel. Il lui indique la mort, le 15 mars 1944, de son aïeul tchécoslovaque, à Auschwitz-Birkenau (Pologne). Rapidement, le petit-fils pointe des anomalies : « Le document mentionne un convoi parti de Drancy qui n’a jamais existé. » Renseignements pris auprès du Mémorial de la Shoah, aucun Mendel Ruttner ne figure dans les registres. Et pour cause : il a été fusillé par les Nazis en Périgord, à presque 2 000 kilomètres de là !

Pierre de Rosette

Grâce aux efforts conjugués du célèbre avocat Serge Klarsfeld et de Bernard Reviriego, le fil de l’histoire familiale s’extirpe des méandres de la Grande Histoire. « Il me faut, à un moment, une pierre de Rosette pour tout comprendre, illustre Bernard Reviriego. Là, grâce à un document, j’ai identifié les cinq victimes enterrées à Sainte-Marie, dont un Mendel Sikove. » Jean-Jacques Ruttner tombe alors sur un article relatant cette découverte : « En recoupant nos informations, nous avons compris que mon grand-père Mendel Ruttner avait pris le nom de sa mère, Sikovic, devenu, à cause d’une erreur administrative, Sikove. » La comparaison d’une photo d’identité judiciaire aux archives familiales permet de dissiper le doute. « Ce que je trouve dramatique, c’est que ma grand-mère et mon père n’auront jamais su. J’ai vécu mon enfance avec ce vide. Pourtant, tous les éléments étaient là, dans les mains de l’administration », peste Jean-Jacques Ruttner.

Le Tchécoslovaque Mendel Ruttner et l’Ardennais Roger Stévenin, fauchés en Périgord par les Nazis en mars 1944, ne se sont peut-être jamais croisés. Ils sont morts loin des leurs, mais ne sont plus disparus. Presque 80 ans après, c’est une victoire contre l’oubli que vient de remporter Bernard Reviriego. Elle a peut-être plus de valeur que le trésor du cimetière de Sad Hill. La famille Ruttner souhaite qu’une plaque soit apposée sur la sépulture de Mendel Ruttner (et non pas Mendel Sikove) au cimetière de Sainte-Marie-de-Chignac (commune de Boulazac-Isle-Manoire). Idem pour la famille de Roger Stévenin, à Cantillac (commune de Brantôme-en-Périgord). »

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