A.N.A.C.R. Dordogne

…Revenons dans la Préfecture du département de la Dordogne, à Périgueux, pour découvrir une plaque que nous côtoyons chaque jour, sur le chemin du collège, en allant rendre visite à des amis, en faisant nos courses ou simplement en flânant dans la ville, une marque du souvenir qui nous est devenue si familière que nous passons devant sans la voir.
Rendons-nous dans le secteur de la cathédrale Saint-Front et remontons la rue de la Clarté, jusqu’au n° 3 où une plaque, apposée à l’endroit même où se trouvait la boutique à l’enseigne du Tailleur roubaisien, rappelle le souvenir de Zyndel Weismark.
Elle a été inaugurée, le dimanche 22 octobre 2006, en présence de près de 200 personnes, de sa fille, Betty Wieder, du rabbin Kirch et de Messieurs Raphaël Bartolt, préfet de la Dordogne, Bernard Cazeau, président du Conseil Général de la Dordogne et Xavier Darcos, maire de Périgueux.
Zyndel Weismark est né le 25 mai 1906 à Bendzin, ville industrielle du sud de la Pologne. Polonaise de confession juive, la famille Weismark a émigré en France dans les années vingt et s’est installée à Périgueux en 1934, avec leur jeune enfant, Jacques, né en 1932. Betty, sa soeur, naît en 1937 à Périgueux où la famille est domiciliée 3, rue de la Clarté.
Les Weismark y tiennent un magasin de confection sous l’enseigne « Tailleur Roubaisien » et Zyndel, tailleur de profession, y réalise des vêtements sur mesure pour ses clients. Zyndel, « communiste, comme le rappelle Guy Penaud, dans son Mémorial des déportés du Périgord[…] s’engage, en 1936, dans les Brigades Internationales et passe un an en Espagne. » Après cet épisode outre-Pyrénées, il est de retour à Périgueux où, le 28 février 1942, l’un de ses meilleurs amis, commissaire de police, est venu le chercher « pour quelques questions à la mairie ». Doublement traqué comme juif et comme ancien brigadiste communiste durant la Guerre d’Espagne, il est d’abord interné durant un an au camp du Vernet, en Ariège.
Son épouse, Kajla Weismark (dite Carola) et ses deux enfants reçoivent l’ordre de quitter la ville et sont assignés à résidence, en janvier 1943, à Négrondes. « Ils y vivent, selon le site de l’AJPN (Anonymes, Justes et Persécutés durant la période Nazie dans les communes de Francejusqu’au début de l’année 1944 en compagnie des Tajchner, la mère et les deux jeunes soeurs de Kajla Weismark, qui les ont rejoints après s’être enfuies de Paris. »
Au début de l’année 1944, alors que la persécution des Juifs en Dordogne atteint son point culminant et « ne peut s’expliquer, selon nous (Bernard Reviriego, Les Juifs en Dordogne 1939-1944, de l’accueil à la persécution), que par référence à la Solution finale appliquée par le général Brehmer en Dordogne durant 7 jours », les six membres de la famille Weismark-Tajchner ne doivent leur salut qu’à une famille habitant Négrondes et impliquée dans la Résistance, celle de Louis et Marie Basbayon, aidés par Marie-Louise, leur fille de vingt-trois ans qui, bien que ne les connaissant pas, vient alors au secours des réfugiés. S’estimant trop en danger à Négrondes, Kajla Weismark décide de rejoindre, avec ses deux enfants, son frère, près de Toulouse. « C’est, selon le site de l’AJPN, Louis Basbayon qui les emmène à la gare de Thiviers avec sa carriole et c’est encore lui qui prend les billets avec sa carte d’identité car les Allemands présents demandent les papiers. Elles réussissent à monter dans le train et arrivent saines et sauves à destination. ». Louis, Marie et Marie-Louise Basbayon ont été honorés, en 1995, du titre de « Justes parmi les nations ».
Quant à Zyndel, interné à Gurs sous le matricule 2384, il fait partie des 925 hommes et femmes qui, le 27 février 1943, sont transférés à Drancy. Il quitte Drancy le 4 mars 1943 par le convoi n° 50 à destination de Majdanek (officiellement KZ de Lublin). Ce convoi, comme le n° 51 parti le surlendemain, est décidé par les Allemands en représailles d’un attentat ayant visé, selon le site Hewish traces (Mémoire et histoire des réfugiés juifs pendant la Shoah), « le 13 février 1943, vers 21 h 10, le lieutenant colonel Winkler et le major Dr Nussbaum, de l’état-major du IIIe détachement de la Luftwaffe, […] alors qu’ils se rendaient de leur bureau à leur logement. »
Zyndel Weismark, selon le journal officiel de la République française du 24 janvier 2002, page 1630, est « décédé le 9 mars 1943 à Lublin-Maidanek (Pologne) et non le 4 mars 1943, sans autre renseignement. » Il avait 37 ans. Il est inscrit sur le Mur des Noms, monument de mémoire situé sur le parvis du mémorial de la Shoah dans le quartier du Marais, dans le 4e arrondissement de Paris.
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