Décès de Bernard Ruaud

Décès de Bernard Ruaud

Sud-Ouest n’en rendra pas compte, Bernard Ruaud, dit « Popeye », n’aura pas connu les épopées du Groupe Lucien Sampaix en Dordogne. La Dordogne il l’aura traversée à vélo en 1943, avec une courte halte à Hautefort. A 18 ans, il fuyait, assuré d’être arrêté par les Allemands en raison des sabotages qu’ils perpétuait sur son lieu de travail de la base sous-marine de Baccalan à Bordeaux. Son contact à Hautefort lui conseilla de rejoindre les groupes de résistants déjà bien organisés en Corrèze et il rejoindra le Groupe Lucien Sampaix à Gimel-les-Cascades.

Conduit par un légal, il découvre les  conditions rudimentaires de vie dans un camp des Francs Tireurs et Partisans: « Des sortes de grandes marches horizontales sont creusées dans le sol pentu, d’à peu près deux mètres sur trois. Elles constituaient le plancher des futures cabanes. Des rondins et des branches étaient destinés à former la charpente d’une toiture à double pente puis recouverte de plaques d’herbes et de mousses. Ces cabanes, construites dans la journée, étaient parfaitement efficaces contre les intempéries ».

L’activité au camp était faite de tâches relatives à la sécurité et à l’intendance : la garde, le ravitaillement, la confection des repas, L’action armée à l’encontre des occupants ou de ses auxiliaires du gouvernement de Vichy, tous en rêvaient. Mais la véritable guérilla n’était pas encore à l’ordre du jour. En revanche, des actions de sabotage étaient programmées sur des installations indispensables à l’ennemi, des usines travaillant pour l’ennemi. La mise hors d’état de nuire de quelques agents des nazis fut également à l’ordre du jour.

Mi-septembre 1943, le détachement change de cantonnement pour s’installer à Pouymas Bas.

Le camp composé de quelques 25 garçons y était installé depuis quelques semaines. Ils savaient que les recherches que menaient sans relâche les autorités de Vichy pour débusquer les maquisards représentaient une menace de plus en plus précise. La décision avait été prise de changer à nouveau de cantonnement. A cet effet des contacts sûrs au village de La Vialatte sur la commune de Saint Victour, avaient été pris.

Un petit groupe était parti en éclaireur sous la conduite de « Mickey » pour préparer le nouveau campement, le «gros» de la troupe devant rejoindre le lendemain. « Mimile » et Hercule étaient en train de vérifier les comptes de la caisse du détachement. Des maquisards se reposaient près des abris, un autre lavait son linge dans le ruisseau. « Sacco », montait la garde avec deux autres camarades.

Ceux au camp avaient été mis en éveil par des craquements venant du bois attenant. Mais avant qu’ils aient réagi, Sacco venait vers eux en courant et en criant à l’alerte. En quelques secondes, sans sommation, une formidable fusillade éclata venant de tous les côtés.

Les maquisards ont immédiatement bondi sur leurs armes, essayant de répliquer de leur mieux. Mais la confusion était totale du fait de la soudaineté de l’attaque. Observant la direction des tirs, le seul passage semblant encore possible pour s’échapper avant que la boucle ne se referme, était d’emprunter le marécage proche du ruisseau. Le gros de la troupe a pu s’engager par ce passage.

Quelques minutes plus tard, ceux qui avaient pu fuir étaient hors d’atteinte sous les couverts mais ils devaient bientôt constater que cinq des membres du groupe, dont Popeye, n’avaient pu s’échapper. Ils furent emprisonnés tout d’abord à Tulle. Le 31 janvier 1944, ils furent transférés à Limoges puis le 13 mars à la Centrale d’Eysses. Le 30 mai 1944, la Centrale passe aux mains des SS. Ils sont ensuite transférés à Compiègne puis, le 18 juin, c’est le départ vers Dachau pour des mois de de faim, de servitude, de vexations, de punitions, d’épuisement, de souffrance, d’incertitudes. Ils eurent la chance de survivre à l’enfer des camps et furent libérés le 30 avril 1945.

Connu pour son premier métier après la libération, de « casseur d’assiettes sur les foires et marchés », Popeye va trouver sa voie dans la métallurgie avec la création de son entreprise de fabrication de remorques pour les voitures et va fonder une famille.

Il a rédigé un ouvrage publié en 2016 aux éditions du Trèfle, « Né un vendredi 13 », qui raconte son entrée en Résistance, sa capture et son internement.

Nous avions retrouvé ce camp de Pouymas Bas et le propriétaire des lieux nous avait accompagné sur place, transportant Popeye dans son 4X4. Cette visite fut relaté sur ce site le 13 janvier 2019: https://cdm24.fr/retour-de-popeye/

Une plaque, à l’initiative des descendants de ces Résistants, sera inauguré le vendredi 4 septembre à Pouymas Bas, à l’orée de ce bois où leurs pères se retranchèrent, pour rappeler et honorer leur présence en ces lieux.

Le Bureau du CDM adresse à sa famille et à ses proches ses plus sincères condoléances.

A lire, aussi, le poème écrit pour son grand-père par sa petite-fille, Marion: « Matricule 73973 » 

 

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