Commémoration à Fossemagne, Azerat et Thenon

Commémoration à Fossemagne, Azerat et Thenon

Trois commémorations ont été organisées à Fossemagne sous l’égide de Dominique Bousquet, Conseiller général, Président de la Communauté de communes du Terrasonnais en Périgord Noir, Thenon, Hautefort, sur le lieu d’un maquis du Groupe Roger de l’Armée Secrète (AS) à Fossemagne, à Azerat ou un résistant de l’AS a été tué lors d’un accrochage avec un convoi allemand et, enfin, à Thenon, au Poteau d’Ajat, ou le nouveau chef départemental des opérations des Francs Tireurs et Partisans Français (FTPF) et deux autres résistants ont été tués au combat.

Une gerbe a été déposée au pied de ces stèles et Jean-Paul Bedoin, Président du Comité départemental de l’ANACR a lu pour chacune un texte rappelant les faits :

A Fossemagne

Les noms de deux jeunes combattants, René Victor Heitzler et Elie Chatelier, capturés et assassinés respectivement en mai et août 44, figurent sur cette stèle, ainsi que sur le Mur des fusillés à Périgueux. La stèle, implantée dans la forêt Barde sur l’emplacement du maquis du Groupe Roger de l’AS, a été inaugurée e présence de Martial Faucon qui avait rejoint ce Groupe. Un premier hommage lui a été rendu dans l’allocution prononcée par Jean-Paul Bedoin.

9 août 1944 à Azerat:

La R.N. 89 a été le lieu de nombreux accrochages entre Allemands et Résistants. Entre Thenon et Azerat s’élève une stèle qui porte le nom de FAVARD Edgar, 21 ans, tué au combat, au cours de l’attaque par l’A.S., d’un convoi allemand parti de Périgueux et se dirigeant vers Brive. Ce convoi fut harcelé sur tout le parcours par les F.F.I

31 mars 1944

La Dordogne doit faire face à la terrible opération menée par la division Brehmer, dépêchée par le commandement allemand pour tenter de briser la Résistance et empêcher la population de lui porter assistance. C’est que l’ennemi a pris conscience des coups portés à son effort de guerre.

Malgré les terribles exactions auxquelles elle se livrera, cette sinistre division échouera dans son désir de détruire la Résistance.

Le 31 mars 1944 au petit matin, les maquisards Francs-tireurs et Partisans de Gardette de retour vers leur base atteignent les abords de la RN 89, au lieu-dit Bellevue. Ils sont chargés de leurs sacs, des armes et des munitions. La marche de nuit a été pénible et ils se reposent un instant avant de traverser la dangereuse Nationale. Aux côtés du chef départemental Jean-Baptiste Delord qui vient d’être nommé en Dordogne commissaire aux effectifs, en remplacement d’André Bonnetot, parti à l’inter région, il y a notamment Samson Roche et Jean Givord, deux figures connues du maquis. Le jour s’est levé depuis un bon moment et des précautions supplémentaires s’imposent pour aller de l’avant.

Aussi est-il décidé que le franchissement de la route sera effectué séparément, avec intervalles entre chaque passage. Roche, puis Givord passent.

Qu’est-il advenu derrière ?

On le saura un peu plus tard, grâce surtout aux habitants situés à proximité, témoins bien involontaires de la scène, et qui ont eu à en souffrir cruellement.

Ce matin-là, en effet, un des éléments de la division Brehmer fait une station sur le plateau, avant de poursuivre sa progression vers Thenon et Terrasson. A une centaine de mètres de l’endroit où les maquisards ont décidé de franchir la route, une ou plusieurs automitrailleuses, masquées à leur vue par le virage, surveillent les alentours… Et leur mortelle présence n’a malheureusement pas été décelée. Si les deux premiers n’ont pas été immédiatement aperçus, il n’en sera pas de même pour les suivants, qui vont servir de cible. Tous les membres du groupe, sauf un qui rebroussera chemin, réussissent cependant à traverser la chaussée. Mais les trois derniers, avec Jean-Baptiste  Delord, se sont jetés dans les vignes, alors présentes à cet endroit et qui n’offrent pas un très bon couvert.

On ne connaîtra jamais exactement comment le nouveau responsable départemental et les deux autres garçons ont été touchés. Mais il apparaît que, voyant leur fuite compromise, ils ont, à un moment donné, fait face aux soldats qui s’étaient lancés à leurs trousses. La durée de l’engagement en témoigne et les gens du voisinage ont nettement perçu les tirs partant de la vigne, ainsi que les explosions des grenades défensives lancées en direction des assaillants. Perdu pour perdu, Delord a eu, selon toute vraisemblance, l’ultime réflexe de fixer l’adversaire afin de permettre à ses camarades de s’échapper. Le bilan est cependant très lourd. Jean-Baptiste Delord, 24 ans, et Jean Nadal, 21 ans, sont tombés au pied d’un cep. La troisième victime se nomme Jacques Tête, un garçon venu de Normandie. Il sera capturé vivant. Gravement blessé à un pied, il n’a pu aller plus avant.

Plusieurs fermes sont situées à quelques centaines de mètres du lieu de l’accrochage. La troupe allemande, en proie à la plus vive excitation, fait irruption dans celles-ci au cours des minutes qui suivent le début de l’accrochage.

Des occupants vont être embarqués et leurs maisons pillées, comme chez les Mercier et les Dubreuil. Ils seront libérés grâce à l’intervention courageuse du Maire René Salon.

Parmi les libérés, M. Dubreuil, paisible octogénaire est pourtant arrêté à nouveau sur la route. Le véhicule l’emportant bifurque sur la voie qui mène aux deux fermes de la Banargerie… desquelles s’élèvent des volutes d’épaisse fumée. Et quand leur parviennent les échos d’une courte rafale d’arme automatique, ils pressentent, qu’un crime vient d’être commis.

Ce n’est que le 8 avril que l’affreuse vérité sera découverte. Le corps calciné du malheureux octogénaire gît sous les décombres noircis de sa maison. L’on ne saura jamais s’il était déjà mort à ce moment-là.

Mais revenons à ce matin du 31 mars à la mairie, où Jacques Tête, blessé, est « questionné » et roué de coups. Ses gémissements de douleur ont été rapportés par les témoins qui ont entendu crépiter les armes derrière l’immeuble communal, où il a finalement été exécuté.

Les bourreaux vont dissimuler la tête tuméfiée de leur victime dans un sac et ils « réquisitionnent » deux employés de la mairie, pour la manutention de son corps ainsi que ceux des deux autres maquisards qui sont récupérés. Les trois corps sont placés sur un tas de fagots entreposés dans une dépendance.

Les allemands allument les feux. La ferme et ses bâtiments attenants ne seront bientôt plus que ruines fumantes.

Les restes des trois FTP, affreusement calcinés, seront découverts le lendemain 1er avril et une sépulture provisoire leur sera donnée, immédiatement après le départ de la force répressive.

Après le rappel des faits par Jean-Paul Bedoin, Sylviane Ranoux, Présidente du Comité de Périgueux de l’ANACR et Secrétaire de notre association CDM 24, a rendu hommage à Martial Faucon, résistant et écrivain passeur de mémoire décédé en ce mois de juillet 2022. Voici le texte de cette oraison, prononcée en présence de son fils Pascal Faucon et de sa belle-fille Christine:

 

Il est né le 19 décembre 1924 à AJAT.
A l’âge de 15 ans en 1940, son père étant en captivité, il aide sa
famille dans l’exploitation agricole en fermage.
En octobre 1943, un mois avant ses 19 ans, il se met service de la
Résistance.
Il participe alors à son organisation et à la constitution dans la forêt
Barade d’un groupe de l’Armée Secrète.
Instruit par l’officier britannique Peter LAKE, parachuté en avril 1944
en Dordogne, il devient un spécialiste du renseignement et du
sabotage.
Il participe ensuite avec l’accord du responsable du groupe de
l’Armée Secrète, au service B de renseignements des Francs-
tireurs et Partisans Français FTPF du secteur du Périgord Noir.
Entre autres, en juillet 1944, il dirige et participe à la destruction
d’un pont ferroviaire métallique sur la ligne Bordeaux-Clermont-
Ferrand via Brive, contribuant à empêcher la concentration des
Forces allemandes de Clermont-Ferrand et le renforcement de la
base sous-marine de Bordeaux.
Nommé lieutenant FFI à la Libération, il signe un engagement
volontaire pour la durée de la Guerre.
Il est affecté au 134ème RI « Oradour » constitué à Périgueux qui
devait combattre sur le Front de l’Est mais, la capitulation allemande
survenant, assurera, en Lorraine, le retour de l’Armée Française.
Le 3 février 1945, son grade de lieutenant FFI est homologué
adjudant-chef dans l’Armée. Affecté au 126ème RI en tant que chef
de section, il assure dès novembre 1945 à ALTEINSTEIG la garde
du Poste de commandement du régiment. Avec son unité, il rejoint
le Limousin où il sera démobilisé en mai 1946.

Son engagement total pour la Libération de la Patrie sera
sanctionné par de nombreuses décorations et diplômes, entre
autres :
– Croix du combattant volontaire de la Résistance
– Croix du combattant guerre 1939/1945
– Titre de reconnaissance de la Nation
– Diplôme d’Honneur aux combattants de l’Armée Française 39/45
– Officier de la Légion d’Honneur
Peu après sa démobilisation, il rejoint la nouvelle presse de la
Résistance, devient journaliste professionnel à Bordeaux puis à
Limoges et prend des responsabilités de direction dans deux
quotidiens régionaux.
Parallèlement et surtout depuis son entrée en retraite en 1989, il
rejoint la vie associative afin de défendre les valeurs de la
Résistance.
Nous lui devons de nombreux écrits sur la période de la Seconde
Guerre mondiale en Dordogne, notamment :
– Francs-tireurs et Partisans Français en Dordogne : ouvrage de
témoignages collectifs dont il assure l’écriture ou l’adaptation
des textes – Editions de 1990 et 2006
– Participation à En Dordogne La Résistance de l’ANACR de
1996
– Récits vécus en thenonnais Pays d'Ans et alentours. Front de
l'atlantique‎
– Récits inédits – Les années de guerre et de Résistance en
Terrassonnais et alentours avec Lucien Cournil en 2001
– Les enfants martyrs de la Bachelerie en 2009
Ainsi après avoir lutté pour notre Liberté, il s’est investi dans le
travail de mémoire aussi bien pour montrer le courage de nos
résistants et d’habitants mais aussi pour révéler les crimes odieux
des Nazis, participant ainsi efficacement à l’œuvre de PAIX, mission
qu’il poursuivra jusqu’à son dernier souffle le 12 juillet dernier.

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